Quelles seront les répercussions sur le monde du travail ?

Mohamed Saïb Musette : Quelles seront les répercussions sur le monde du travail ?

Une probable hausse du taux de chômage, des difficultés pour le fonctionnement des administrations et des problèmes de financement pour l’Ansej, l’Angem et la CNAC.

Contrairement aux assurances du gouvernement, les mesures d’austérité prises pour faire face à la baisse des recettes pétrolières se répercuteront inévitablement sur le monde du travail en Algérie. Le gel des recrutements dans la Fonction publique pour l’année 2015 ne sera pas sans conséquence sur le front social et sur le fonctionnement des administrations publiques. C’est ce que pense le sociologue et spécialiste du monde du travail, Mohamed Saïb Musette.

Interrogé, hier, sur les conséquences des coupes budgétaires décidées par l’Exécutif, sur l’emploi et l’avenir des jeunes, le chercheur du Créad affirme : «Il y aura certainement des répercussions. Mais quel sera leur niveau ? Des masses de personnes sont employées dans la Fonction publique qui est actuellement saturée parce qu’on n’a pas remplacé certaines fonctions. Dans les services de l’état civil, par exemple, on utilise l’emploi des jeunes. Mais est-ce que ce dispositif sera maintenu ? Le problème risque de se poser encore pour l’éducation, l’enseignement, la santé et les fonctions administratives qui emploient beaucoup de jeunes qui bénéficient des indemnités de l’ANEM. Est-ce que cela va se substituer aux recrutements ?» .

Selon Mohamed Saïb Musette, un malaise risque d’être provoqué dans la mesure où les milliers de jeunes bénéficiaires des contrats ANEM, qui attendent un recrutement, se retrouveront dans des situations difficiles. En l’absence de recrutement dans la Fonction publique, ajoute-t-il, le fonctionnement des administrations pourrait également être affecté. «La contrainte concernera le remplacement des personnes appelées à prendre leur retraite. Comment agir ? Va-t-on différer les retraites ou les accélérer ? Une décision a été émise pour que toutes les personnes remplissant les conditions partent à la retraite. Comment les remplacer ? A-t-on suffisamment de personnel pour faire des promotions internes ?», développe-t-il. Mohamed Saïb Musette invite, dans ce sens, à l’accélération de la modernisation de l’administration par l’introduction du e-gouvernement. «C’est un processus long et difficile, mais on doit aller vers cette solution», suggère-t-il.

Le financement des microentreprises dans le cadre des dispositifs Ansej, Angem et CNAC pourrait aussi être concerné par les mesures d’austérité. Pour le sociologue, ces structures seront probablement appelées à compter sur elles-mêmes et avoir une autonomie de financement. «Pour cela, il faut compter sur les remboursements des crédits accordés. Ces structures auront probablement besoin d’un supplément qui ne sera pas de même intensité de financement, parce qu’elles doivent compter sur les remboursements des prêts pour continuer leur travail. Il est très probable qu’il y aura une réduction de la subvention de l’Etat. Dans ce cas, elles ne pourront pas continuer à financer à la même hauteur qu’aujourd’hui les demandes de crédit des jeunes pour la création d’entreprises. Si l’on accélère la cadence des remboursements, il y aura probablement des liquidités pour financer de nouveaux projets», appuie-t-il.

Soulignant la faiblesse de recrutement dans les administrations enregistrée ces dernières années, M. Saïb Musette n’écarte pas une légère hausse du taux de chômage : «Il y a une probabilité que le chômage repartira à la hausse, mais il est possible aussi que l’informel sera redynamisé. Les gens ne vont pas rester sans rien faire. L’informel a toujours été cette petite soupape de sécurité. Donc, il pourrait y avoir une légère hausse du taux de chômage, mais je pense qu’il ne sera pas imeportant.»

 
Madjid Makedhi